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08. download PDF | Behind the Rainbow 04
 

'' Behind the Rainbow suggests the hopeful possibility of having a “one rug for all”. ''


Blaire Dessent, November 2016
2014-2015, collage of prayer rugs on canvas, 100 x 70 cm.
Courtesy of the artist and Ceysson & Bénétière, Paris.

 




Aujourd’hui, dans de nombreux pays, l’homosexualité et les droits de la communauté LGBTQ, notamment le mariage mais aussi le simple fait de s’embrasser en public, demeurent strictement interdits et punis par la loi, et les autorités religieuses et politiques n’apportent aucune aide, pas plus que des réseaux de soutien quasi inexistants avec lesquels on pourrait instaurer un dialogue. Encore récemment, deux jeunes filles marocaines de 16 et 17 ans ont été jetées en prison pour s’être embrassées. Rien qu’en juin 2015, un hebdomadaire marocain bien connu mettait sur sa couverture deux hommes accompagnés du titre « Faut-il brûler les homos ? », un homme était condamné à quatre mois d’isolement en prison pour avoir été jugé gay, et un autre était agressé dans les rues de Fès par un groupe d’hommes, tandis que les passants ne faisaient rien pour le secourir. Tout ça dans un seul pays. Et même dans des pays comme les Etats-Unis, cette liberté durement acquise et enfin acceptée demeure fragile.

En cherchant différents tapis de prière pour une nouvelle série de collages textiles, Mounir Fatmi s’est aperçu qu’il existait des styles faits pour plaire aux femmes, dominés par des roses et des jaunes, et d’autres destinés aux hommes, composés de nuances plus sombres de bleu et de vert. En combinant des fragments des deux types de tapis de prière, Fatmi a créé une série de cinq collages aux tons arc-en-ciel intitulée Derrière l’arc-en-ciel. Réalisée entre 2014 et 2015, cette série porte la gamme des couleurs de l’arc-en-ciel aujourd’hui universellement reconnue comme étant liée au drapeau symbole des droits des LGTBQ, combinée avec le symbole d’une religion qui refuse encore d’accepter l’homosexualité.

D’une certaine façon, le tapis de prière islamique est comme un espace privé mobile. À l’heure de la prière, on sort le tapis et on le déroule là où on se trouve, et il confère à son utilisateur un sentiment de privauté et d’intimité dans ses prières malgré le reste du monde qui s’affaire autour de lui. C’est un élément réconfortant et sûr, un espace où on peut être soi-même. Mais que faire si on vous refuse cette liberté, cet espace où on a le droit d’être qui l’on veut être ? Si on n’est pas accepté pour ce qu’on est ? Derrière l’arc-en-ciel suggère la possibilité porteuse d’espoir d’avoir « un tapis pour tous », ces collages magnifiquement réalisés et pleins de couleurs, de motifs et de formes abstraites combinés avec des images d’architecture, des symboles et des motifs décoratifs islamiques. Ils vont bien ensemble. ?

Dans les panneaux verticaux de Derrière l’arc-en-ciel n°6, les éléments architecturaux cousus dans le tapis de prière ont été soigneusement découpés pour être reconstruits dans les champs de couleurs pour que les bâtiments soient reconstitués à l’intérieur de cet arc-en-ciel. Est-ce que la religion, une structure typiquement patriarcale, est capable d’absorber ceux qui ont une orientation sexuelle différente de ce qui est considéré comme la norme ? Est-ce que les leaders religieux et politiques, mais aussi les fidèles, peuvent trouver en eux la paix qui leur permettrait d’accepter quelque chose de différent ? Dans Derrière l’arc-en-ciel n°3, une image de la Kaaba est imbriquée dans un morceau de tapis vert, en son centre. On peut presque voir cela comme un nouveau drapeau, ayant pris cette forme noire et sobre pour la réintégrer dans un nouveau bandeau de possibles colorés.?

Un grand nombre de gens continuent à se battre sans bénéficier du moindre soutien ni de la moindre compréhension, toutefois des petits fragments d’espoir existent. En 2015, Le Monde des religions publiait un article sur Ludovic-Mohamed Zahed, le premier imam ouvertement homosexuel de France et le fondateur d’une ONG, HM2F, pour les musulmans homosexuels de France. Il est lui-même marié et a récemment marié deux femmes iraniennes en Suède, mais il utilise aussi le Coran pour éduquer les gens sur les vraies opinions du Prophète sur ce sujet et sur la désinformation au sujet de l’homosexualité qui a gagné toute cette religion. Ce sont certes de petits pas, mais dans la bonne direction.


Blaire Dessent, Novembre 2016.

Traduit de l'anglais par Patrick Haour.


 

 

 

In many countries today homosexuality and LGBTQ rights, including marriage and even the simple right to kiss in public, remains bitterly forbidden and punishable by law, and there is no help by the part of religious leaders or other officials, let alone much in the way of a support network from which to start a dialogue. Just last week two young girls in Morocco, ages 16 and 17, were put in jail for kissing in public. In the month of June 2015 alone, a popular Moroccan weekly magazine featured a cover of two men with the headline, “Should gays be burned?”, one man was sentenced to four months of isolation in prison for being judged gay, and another man was attacked on the streets of Fes by a large group of men, while people looked on and did nothing to help. And that is just in one country. Even this hard fought freedom now finally accepted in countries like the United States still remains vulnerable.

When researching different prayer rugs for a new series of textile collages, Mounir Fatmi noticed that there were styles made to appeal to women, with pinks and yellows, and others geared towards men, made with darker hues of blues or greens. By combining fragments of prayer rugs from both, Fatmi constructed a series of five, rainbow hued collages titled, Behind the Rainbow (Derriere l’arc en ciel). Made between 2014-2015, the series shows the rainbow/ROYGBIV gradation now universally linked to the flag and symbol for LGBTQ rights, fused with a symbol of a religion that still refuses to accept homosexuality.

In many ways, the Muslim prayer rug is sort of like a mobile space of one’s own. If it’s time to pray, out comes the carpet, unrolled and laid out on the spot, giving the user a feeling of privacy and intimacy in his prayers despite the rest of the world moving on around him. It’s almost like a security blanket in that sense, something likely comforting and reliable, a space on which you can be yourself. But what to do if you are not allowed that freedom, not allowed that space to be who you want to be? Are not accepted for who you are? Behind the Rainbow suggests the hopeful possibility of having a “one rug for all”, these beautifully made collages full of colors, patterns, and abstracted forms merging with images of Muslim architecture, symbols, and decorative motifs. They look good together.

In the vertical panels of carpet of Behind the Rainbow #6, architectural elements sewn into the prayer rugs are carefully cut out and re-constructed within the color fields so that the buildings are rebuilt within this rainbow. Can religion, a typically patriarchal structure, absorb those who have different sexual orientations than what is deemed the norm? Can religious and government leaders, as well as religious believers, find peace within themselves to embrace something different? In Behind the Rainbow #3, an image of the Kaaba is set in the green slice of carpet, front and center. It can almost be read like a new flag, taking this black, sober form and reinserting into a new swath of colorful possibilities.

So many people continue to fight a battle without any form of support or understanding, yet small outlets of hope can be found. In 2015 Le Monde des Religions featured an article about Ludovic-Mohamed Zahed, the first openly homosexual imam in France and founder of the non-profit organizations HM2F, for homosexual Muslims in France. He is married himself and he recently married two Iranian women in Sweden, but he is also using the Koran itself to educate others about the real beliefs of the Prophet on this subject and the misinformation about homosexuality which has gone rampant in the religion. Small steps perhaps, but steps in a positive direction.

Blaire Dessent, November 2016.